L’Alsace se démarque des autres régions viticoles de France par la diversité des vins monocépages qu’elle propose; mais elle a de tout temps réservé une part plus ou moins importante de sa production à l’élaboration d’assemblages, que ce soit d’assemblages de vins ou d’assemblages de raisins pressurés et vinifiés ensemble.
Le plus connu des assemblages alsaciens est bien sûr l‘ Edelzwicker (“edel”, noble et “zwicker”, assemblage), vendu généralement au litre, contrairement à tout le reste de la production. Il s’agit d’un assemblage de vins, constitué de deux ou plusieurs cépages de l’AOC Alsace. L’edelzwicker est un vin généralement destiné à la cuisine de tous les jours, à la soif ou encore pour la confection du petit blanc-cassis que l’on siffle d’une traite sur le zinc.
Le riesling est le nom vulgaire du cépage Gentil aromatique, dont il est possible, selon l’ampélographe Jean-Louis Stoltz, qu’il soit présent en Alsace depuis Charlemagne, celui-ci ayant beaucoup fait pour l’extension de la viticulture sur les rives du Rhin.
Le traminer, lui, correspond au Gentil-duret, un cépage qui tire son nom de la petite commune du Tyrol italien “Tramin” et qui est planté au moins depuis 1500 dans le Palatinat, sur la barrière rhénane. A noter au passage que le gewurztraminer (littéralement “traminer épicé”) est l’aboutissement d’une sélection de plans de traminer donnant les raisins les plus épicés de ce cépage.
Au XIXe siècle, le Gentil-duret se trouve presque toujours en réunion avec d’autres cépages, et en particulier avec le Gentil aromatique, mais aussi avec le “tokai gris”, le pinot blanc et le chasselas. L’assemblage du Gentil-duret et du Gentil aromatique a ainsi naturellement donné naissance aux vins “Gentils”. A Guebwiller, où le vin Gentil était appelé “Kütterlé”, on associait la variété rouge et blanche du Gentil-duret avec du chasselas.
Le Gentil donc, (un terme équivalent à “noble” dans son sens le plus ancien) est moins célèbre. Mais cet autre assemblage de vins, composé lui aussi de deux ou plusieurs cépages de l’AOC Alsace, doit obligatoirement contenir 50% minimum de cépages nobles que sont le riesling, le pinot gris, le gewurztraminer et le muscat.
L’histoire du Gentil se perd presque dans la nuit des temps et est étroitement liée à celle des cépages riesling et traminer.
D’autres assemblage de vins ne portant pas la mention Edelzwicker ou Gentil existent en Alsace, même si leur composition peut donner lieu à cette appellation réglementaire. Certains producteurs ont pris le parti de ne pas utiliser ces noms, jugés trop négatifs, pour leur préférer des termes exotiques plus vendeurs; une question de marketing. C’est le cas du clos du “Zahnacker”, à Ribeauvillé, un vin issu d’une même quantité de riesling, de pinot gris et de gewurztraminer, et dont l’origine remonte au XIIe siècle ! Ce vin est toujours présent sur la carte de la cave vinicole de Ribeauvillé.
On l’oublie souvent, mais certains muscats alsaciens sont également des vins d’assemblage de raisins, puisqu’il sont fréquemment fabriqués à partir du cépage muscat d’Alsace et du muscat ottonel. Néanmoins, dans ce cas, la loi ne considère pas qu’il s’agit d’un assemblage!
Enfin, on ne saurait faire l’impasse sur le crémant qui, bien souvent, est constitué d’un assemblage de différents cépages (voir notre dossier de mars 2005).
Enfin, la cuvée “Frédéric-Emile” du Domaine Trimbach est un cas à part en matière d’assemblage de raisins.
Là, pas de mélange de cépages puisque cette cuvée est exclusivement composée du cépage riesling, mais les raisins utilisés proviennent de deux grands crus différents, le Geisberg et l’Osterberg, géographiquement contigus. De ce fait, ce vin ne peut légalement porter la mention Grand Cru!